Tinguely n’était pas mécanicien, pas plus qu’il n’était technicien ou
ingénieur. Aux yeux des spécialistes ses machines étaient construites de manière
lamentable. Cependant Tinguely possédait le don infaillible de provoquer
l’attention des passants, et d’établir ainsi une communication par l’emploi de
mécanismes familiers qu’il détournait de leur sens et de leur finalité
quotidienne. Avec Euréka
une énorme machine conçu pour l’exposition nationale suisse de 1964, cette
particularité apparut déjà comme une caractéristique essentiel de son art.
Imprégné des œuvres de Marcel Duchamp
(Ready-made traduction : objets usuels ironiquement promus œuvre d’art) il
s’inscrit dans l’esprit dadaïste qui se manifeste
par la bouffonnerie provocatrice et la dérision souvent en cours de
manifestation publique.
C’est un sculpteur qui, avant tout, utilise des matériaux de récupération
auxquels il redonne vie en utilisant des moteurs pour les animer. Tinguely est
maître incontestable dont l’œuvre compte parmi les manifestations les plus
vivantes de la sculpture du XXe siècle
Il remet en question l’académisme de l’art. Il crée ses machines dans le
contexte des « trente glorieuses »
(les année d’après la 2ème guerre mondiale)
et de son « culte » du progrès.
Construites en partie à l'aide d'objets de
récupération, les «machines» de Tinguely,
consciemment imparfaites, refusent le culte de l'objet neuf produit par
une société de consommation. Il est en avance sur son
temps en pratiquant le recyclage. Il a su se trouver « une
place écologique » dans la société pour
pouvoir faire ce qui lui plaisait. Dans une société ou la
machine est de plus en plus présente, il l’introduit dans
l’art en montrant son aspect ludique et inutile. À
l’instar de ses machines qui s’autodétruisent
après trente minutes de fonctionnement, il délivre son
message philosophique que dans la vie tout à une fin.